(Scroll down for English version) Valeri est ce qu’on appelle communément ‚un putain de génie‘. C’est en le voyant skater qu’on se rend compte que tout est possible et qu’il n’y a pas forcément besoin de faire switch tré sur le 3-plat-4 du Dôme pour faire rêver la jeunesse (ou les vieux cons)… Originaire d’Ukraine, il vit à Berlin et visite régulièrement Paris, et justement, il y était le mois dernier…
FS walride à Créteil le 18 mai 2017
„ILS CHANGENT LE SABLE DES BACS-À-SABLE TOUS LES MOIS“
Il paraît que tu es né pas loin de Tchernobyl, c’est vrai ?
Non, je suis né dans la partie centrale de l’Ukraine mais mes parents ont travaillé dans une ville appelée Slavutych proche de Tchernobyl pendant trois ans. Ils ont participé à la construction de la ville après la catastrophe et j’allais juste leur rendre visite pour des petites périodes. En fait, j’ai plutôt grandi avec mes grands-parents à Krementchouk, à environ 300 kilomètres de Kiev.
Tu es né en quelle année ?
1985.
Donc tu avais un an quand il y a eu la catastrophe. J’imagine qu’on t’en parle souvent…
Je ne sais pas… Quand tu es petit, les enfants peuvent être vraiment méchants, surtout quand tu viens d’ailleurs, donc je ne racontais pas forcément d’où je venais. Aujourd’hui, ça a beaucoup moins d’importance, je peux en parler sans gêne. Tu ne peux pas changer l’endroit où tu es né.
Je me suis toujours demandé comment les gens vivaient avec ça.
Toutes les radiations sont allées vers la Russie Blanche puis vers l’Europe, et Slavutych est construite à l’est, à l’inverse de la direction du vent. Bien-sûr il y a toujours des radiations et des zones polluées autour de Tchernobyl, et des endroits inaccessibles. Au sujet de la ville en elle-même, des trucs fous qui me viennent sont le fait qu’ils changent le sable des bacs-à-sable tous les mois, que l’armée enlève l’écorce des arbres et que les gens ont un meilleur accès à des bons produits et aux médicaments… Mes parents y sont allés travailler pendant trois ans parce que c’était bien payé et que les loyers étaient bas. Ils ne voulaient juste pas avoir toute la famille avec eux et n’avoir que les avantages de la ville.
Sugarcane à Créteil le 18 mai 2017
Quand est-ce que tu es arrivé en Allemagne ?
J’avais cinq ou six ans donc je suis allé directement en CP.
J’imagine que tu te sens plus Allemand qu’Ukrainien, aujourd’hui…
Bien-sûr que j’ai une mentalité d’Allemand mais je me sens aussi attaché à mon pays parce que j’ai toujours gardé le contact avec mes grands-parents en leur rendant visite l’été. Et l’année dernière, j’ai organisé un skate trip avec quelques potes et on est allé voir mon père qui vit toujours là-bas.
C’était comment ?
C’était bien. On a passé une semaine à skater à Odessa avec Sergej (Vutuc), Igor (Fardin), Tjark (Thielker) et Tomasz (Santl) et puis on est allé chez mon père. On n’a pas vraiment skaté là-bas mais c’était cool que mon père nous accueille. Il vit dans une sorte de ranch donc on a fait pas mal de barbecues et des trucs plus culturels que du skate, dont une visite de la centrale nucléaire dans la ville abandonnée de Pripyat… Et les deux derniers jours, on est allés skater à Kiev avec des locaux.
C’est comment Kiev, pour le skate ?
C’est pas mal, le centre ressemble beaucoup à n’importe quelle autre ville européenne, pas comme dans les petites villes d’Ukraine où tout est… disons… plus simple.
Valeri & friends in Ukraine, 2016
Tu as passé une semaine récemment à Paris. Quelles sont les différences les plus flagrantes avec Berlin ?
Beaucoup plus de gens dans un périmètre plus petit. Je ne crois pas que le centre est plus grand mais il y a beaucoup plus de monde… Et les trottoirs sont plus lisses qu’à Berlin !
Et la bière ?
Je ne sais pas… L’été j’aime bien ce genre de bière légère française. Bien-sûr, si tu aimes la bière, en Allemagne il y en a plus de 3000, mais quand elle est bien fraîche et qu’il fait bien chaud, j’aime bien la française.
Et la mentalité ?
Les gens ont l’air d’être plus détendus en ce qui concerne le skate. En Allemagne, soit tu as de la chance et tu ne rencontres que des gens cools, soit tu tombes sur des connards qui appellent tout de suite la police. À Paris on a skaté le mur d’un vieux bâtiment historique à côté de Notre Dame pendant un bon moment, en Allemagne, les gens nous auraient rapidement dit d’arrêter…
Tu as toujours un pro-model ?
Oui, mais bon, c’est pas vraiment important. C’est même assez bizarre de skater une board avec ton nom dessus. C’est Arne (le boss de Radio skateboards) qui décide, mais il me demande toujours des idées de graphiques.
Avant de sortir une board avec ton nom dessus, il te demande toujours ton avis sur le graphique ?
Oui, mais on demande aussi l’avis des autres membres du team, même si à la fin, c’est Arne qui décide.
J’imagine qu’être pro chez Radio ne rapporte pas beaucoup. Tu bosses à côté ?
Oui, j’ai un boulot normal chez Irie Daily, une marque de vêtements basée à Berlin. Je m’occupe du stock, de la distribution, d’un peu tout ce qui concerne le stock.
J’ai vu des modules là-bas…
Oui, skater l’hiver à Berlin ça peut être juste faire des aller-retour au Shelter donc un jour, il y a trois ans, on a décidé qu’on avait assez de place pour mettre quelques curbs. L’hiver dernier, on avait envie d’avoir des modules un peu mieux donc on a construit des plan-inclinés et des quarters. Maintenant on a un bon petit park pour l’hiver !
Entretien réalisé à Paris le 22 mai 2017
FS flip, ollie up, pole jam. Paris le 17 mai 2017
Valeri is some kind of wise wizard. He’s always been creative without even thinking about it. It’s in him. Some people have it, some don’t really have it. He lives in Berlin.
I heard you were born near Tchernobyl, is that right ?
No, I was born in central Ukraine but my parents worked in a city nearby called Slavutych for about three years. They actually build this city after the disaster and I would spend only short times there visiting them. Most of the time, I was with my grand parents who stayed in central Ukraine. Basically I grew up at my grand parents in Krementschug, a town around 300 km from Kiev.
What year were you born ?
1985.
So you were one year old when the disaster happened. I guess people talk to you about it all the time…
I don’t know… Kids can be really mean, especially when you are in school and from a foreign country so I didn’t tell straight away I was connected to this places, but now it’s not a big deal. I can talk about it and it feels right. You can’t change the place you were born.
I mean, it’s fine, I always wondered how people dealt with it.
All the radiation went towards White Russia over towards Europe, and Slavutych is build on the other direction the wind was going. Of course there’s still radiations and high pollution around Tchernobyl, there are places you’re not allowed to go to. For the city itself there are some crazy things stuck in my mind, like they change the playing sand in schoolyards every month, the army takes off the bark of the trees, and people get a pretty good supply with food and medicine… My parents went there to work for three years because it was well paid and the flats were cheap. They didn’t want to have our family all the time there but used the advantages of this place.
When did you make it to Germany ?
I was 5 or 6 years old so I just went straight to first class in school.
You feel more german now, of course, I guess.
Of course my mentality is more german but I feel also related to my country since I would always visit my grand parents in the summer. And last year, I did a skate trip with the crew and visited my dad who still lives there.
„AND EXCURSION TO THE NUCLEAR REACTOR OF THE ABANONED CITY OF PRIPJAT“
How was it ?
Pretty good, we spent a week skating in Odessa with Sergej (Vutuc), Igor (Fardin), Tjark (Thielker) and Tomasz (Santl), and after that we went to my dad’s place. We didn’t skate that much there but it was cool my dad hosted me and my friends. He has some kind of ranch so we had a lot of barbecues and more of a culture program including an excursion to the Nuclear Reactor in the abandoned city of Pripjat… And the last 2 days we spent skating the streets in Kiev with a cool local crew.
How is Kiev for skating ?
Good, the center is almost like a european city, you don’t feel like in the smaller towns of Ukraine where everything is… like… simple in a way.
You recently spent a week in Paris. What are the most obvious differences between Paris and Berlin ?
It’s way more people on a smaller place. I think the center is not bigger than Berlin but it’s more people… and the floor is smoother than Berlin !
What about the beer ?
I don’t know. In the summer I kind of like this light french beer. Of course if you’re into beer, the Germans have about 3000 different types, but when it’s a cold one and it’s the summer, I’m good with the frenchy one.
What about the mentality ?
People seem more easy towards skateboarding. In Germany, either you have a good day and meet nice people, either you meet a lot of assholes that call the police straight away. In Paris we skated some wallride in Notre Dame on some historical building for quite a long time, where in Germany people would have stopped us…
Ollie up, gap ollie to nosebluntslide pop out, Paris (Bercy) 2011
You still have a pro board out ?
Yeah, but it’s not a big deal. It feels also weird to have your name on a board and skate it. I don’t ask Arne (Radio skateboards’ boss) to give me new ones, but he still asks for graphic ideas.
So before putting your name on a board, he does ask what graphic you want on it ?
Yes, but we decide a lot of stuff with the whole team, no matter what the last word is still Arne’s choice.
I guess being pro for Radio doesn’t bring much money, how do you make a living ?
I have a regular job at Irie Daily clothing company in Berlin. I do warehouse stuff and distribution stuff or whatever, I’m taking care of the whole warehouse.
I’ve seen obstacles in there…
Yeah, the winter in Berlin can be only about going skating the Shelter so one day three years ago we decided we had enough room to build some curbs and kept on. This winter, we wanted to have something more serious and we built some banks and quarter pipes. Now it’s a nice little indoor park for the winter !
Irie Daily „wherehouse“, 2016